Originaire du   Kerala (Inde du sud), Le  kalaripayat est l’une des  traditions guerrières vivantes les plus anciennes connues à ce jour. Cette  tradition puise ses racines dans le Dhanurveda, science indienne antique de la guerre, et y intègre une forme spirituelle et ritualistique. En Malayalam, langue provinciale de l’état du Kérala, le nom « Kalaripayat » signifie «  la formation martiale dispensé à l’intérieur du  Kalari ou de l’arène ». Le mot « Kalari » indique le lieu de formation, mot dérivé du Sanskrit  Khaloorika, lieu de formation militaire (armes).

La légende hindoue dit que le sage Parasurama avatar de Vishnu, fonda la terre du Kerala. Pour protéger son peuple et veiller à son évolution, il enseigna l’art du Kalaripayat à vingt-et-un experts. Aujourd’hui encore le Kalaripayat est représenté par la caste guerrière des  Nayars, qui perpétuent leur tradition plurimillénaire tout en la faisant évoluer siècle après siècle…

On raconte aussi que Ta Mo ou Bodhidharma (483-536 après J.-C.), troisième fils de Sughanda, souverain du royaume de Kanchipuram (Sud de l’Inde), 29e patriarche du bouddhisme indien, fut initié dès le  plus jeune âge à l’art du Kalaripayat. Devenu premier ancêtre du bouddhisme Chan chinois, nommé Ren (Zen) au Japon, il serait l’auteur de deux ouvrages, un traité d’assouplissement des muscles et des tendons (Yi Ji Jing) et un autre traitant de la purification de la moelle et du cerveau (Xi Sui Jing). Il aurait enseigné une série de techniques respiratoires et tout un panel d’exercices aux moines de monastères prestigieux (Shao Lin-Lao-Jia et Shao Lin Shi) destinés à les maintenir en bonne santé. Il aurait ainsi participé au développement d’arts tels le Kung-fu, le Tai-chi-chuan, le Karaté, etc

Le Kalaripayat évolua entre le 9e et le 12e siècle après J.-C., et sa forme reste toujours actuelle. Les preuves de certains récits historiques l’attestent, notamment au travers des explorations menées au Kerala entre le 14e siècle et le 16e siècle comme celles du navigateur portugais Duarte Barbosa. On lui doit la popularisation d’une joute folklorique appelée  Jogo  do  pao (jeu du bâton) directement inspirée par le maniement du Ketukaari (bâton long) en Kalaripayat. Aujourd’hui, cette joute fait partie intégralement  de l’identité historique portugaise.

Il est écrit dans les Ballades populaires du nord Malabar que le Kalaripayat était indissociable de la société médiévale locale car il jouait un rôle essentiel dans l’éducation et dans la formation des guerriers. Durant cette période, Le Kerala était composé de plusieurs petites principautés féodales sujet à des conflits constants et récurrents. Le Kalaripayat était à son apogée car les différents seigneurs féodaux réglaient leurs désaccords par des duels dans un Kalari (l’arène). Chaque camp était représenté par leur meilleur guerrier utilisant avec magnificence cet art martial. Chaque village avait son Kalari près d’un temple où résidait un maître renommé et respecté, un Gurukkal.

L’établissement du  Kalari requiert pour sa construction une compétence toute particulière. Cela nécessite l’intervention d’un expert (asari) en science de l’architecture (taccusastram). Le Kalari, creusé à 4 pieds (1,20 m) au dessous du niveau du sol, est toujours orienté Est-ouest, fermé de tous les côtés excepté une petite porte du côté oriental. Les côtes d’un Kalari sont en général de l’ordre de 35 à 42 pieds de long (10 à 12 m), de 17.5 à 21 pieds de large (5 à 6 m), soit la moitié de la longueur, qui est égale à la hauteur (5 à 6 m). Ce type d’architecture est spécialement approprié au climat chaud et humide du Kerala. Le Kalari n’est pas seulement qu’une arène pour la formation martiale des pratiquants, c’est aussi un lieu de culte et de recueillement.